2019 – Lizaveta Tarasevich

Lizaveta TarasevichLe Prix Henry Dunant – Recherche 2019 est décerné à Mme Lizaveta Tarasevich pour son mémoire de LLM « Participation des groupes armés non étatiques à la formation du droit international humanitaire coutumier: défis à relever et solutions possibles. »
Les membres du Jury ont apprécié la nature innovatrice et exploratoire de ce mémoire, et en particulier le fait qu’il contient des propositions concrètes.
En effet, en analysant les implications découlant de la prise en compte des pratiques des groupes armés non-étatiques dans la formation du droit international humanitaire coutumier, Mrs Tarasevich soumet des propositions concrètes qui pourraient aider ces groupes armés à acquérir “une forme de propriété” de ces règles. Ceci devrait donc les inciter à mieux les respecter.
Les membres du Jury ont relevé que Mme. Tarasevich analyse les avantages et les inconvénients de ses différentes propositions sans préjudice, objectivement et scientifiquement.
Enfin, les membres du Jury ont noté que les conclusions de Mme. Tarasevich, qui amènent à tenir compte de la pratique des groupes armés non-étatiques dans la formation du droit humanitaire international coutumier, vont à l’encontre de la tendance dominante chez les gouvernements et l’opinion publique d’exclure les groupes armés non-étatiques de l’encadrement du droit humanitaire international et des droits de l’homme, les brandissant comme des outlaws et les traitant comme tels. L’expérience prouve cependant que si les Etats qualifient tous leurs ennemis de terroristes et d’outlaws, quels que soient leurs motifs, leurs comportements ou la manière dont ils mènent les hostilités, ils ne devraient pas être surpris si leurs ennemis se comportent comme tels.
Les liens avec l’héritage moral d’Henry Dunant sont évidents, puisque ce mémoire traite des sources et du développement du droit humanitaire international, un de ses fondements.

Résumé du mémoire
Participation des groupes armés non étatiques à la formation du droit international humanitaire coutumier: défis à relever et solutions possibles.
La plupart des conflits de notre époque ont aujourd’hui un caractère non international, c’est-à-dire qu’ils concernent des conflits dans lesquels un État combat un groupe armé ou des groupes armés non étatiques se combattant entre eux. La réglementation des traités pour ce dernier type de conflit reste modique. Le droit coutumier, en revanche, peut être un outil utile pour combler ces lacunes. À l’heure actuelle, seule la pratique des États est prise en compte dans le but d’identifier les règles coutumières du DIH. Toutefois, ces règles sont considérées comme contraignantes à la fois pour les États, tout comme pour les groupes armés. Cela pose deux problèmes majeurs: premièrement, les règles font souvent peu de sens pour les groupes armés, leurs particularités n’ayant été prises en compte lors de la formation des règles coutumières. Deuxièmement, du fait que les groupes armés ne se sentent pas inclus conduit à un rejet de ces dernières. Ces problèmes pourraient être résolus en prenant également en compte la pratique des groupes armés.
Cependant, une telle approche pose de nombreux défis que le présent mémoire cherche à identifier, tout en proposant de potentielles solutions. L’objectif général est de trouver les solutions adéquates qui contre-balanceraient les conséquences négatives. Ainsi le travail de recherche souhaiterait inclure la pratique des groupes armés afin que le respect des règles du DIH par ceux-ci soit renforcé.
La première partie décrit le cadre normatif, faisant état de la situation actuelle, de la genèse du droit international coutumier, à la perception du rôle que peuvent jouer les groupes armés dans ce processus. Il est mentionné entre autres, les implications positives et négatives qu’auraient l’admission de groupes armés à la formation du droit international humanitaire coutumier, afin que des solutions efficaces soient identifiées sans toutefois, en contrepartie, négliger les conséquences négatives.
La seconde section soulève six problèmes susceptibles d’empêcher la participation de groupes armés à l’élaboration du droit coutumier. Parmi ces problèmes figurent ceux liés à la sélection des groupes armés, à la propre définition de ce que constitue la loi, à l’acceptation de groupes armés refusant explicitement de se conformer aux règles du DIH, aux difficultés résultant du caractère temporaire de ces groupes armés et leur hétérogénéité. La section suggère également de potentielles solutions juridiques.
Enfin, sur la base de l’analyse faite au préalable, l’auteur conclut que les problèmes qui se posent peuvent être soit éliminés, soit tout du moins atténués. De manière réaliste, le processus d’élimination ou d’atténuation de ces problèmes nécessiterait néanmoins de gros efforts et de nombreuses mesures actives, intrinsèque à la volonté des États d’ouvrir le débat sur cette question. En conclusion, il est souligné qu’il serait judicieux d’aborder ce débat, de manière à atténuer les souffrances des victimes des conflits armés non internationaux et non à désorganiser le système du droit international en vigueur.

Biographie
Lizaveta Tarasevich est titulaire d’un bachelor’s degree en International Law de Belarusian State University (2017) et d’un LL.M de la Geneva Academy of International Humanitarian Law and Human Rights (2019). Elle a travaillé comme volontaire pour une ONG biélorusse qui s’occupe de réfugiés et comme stagiaire à la International Commission of Jurists dans le programme sur Business and Human Rights. Elle est aujourd’hui Associate à la division juridique du Comité International de la Croix Rouge.

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